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Site de Thierry Lodé
26 mars 2006

Anarchiste maintenant

10/02/2010

Th AnarMillauAnarchiste maintenant

--> (Juste un billet d’humeur)

Quelqu’un qui méprise la police ne peut pas être un mauvais homme. Qu’y-a-t-il de plus abject que de faire un métier qui use de la force, du matraquage, de l’emprisonnement, voire du meurtre « accidentel », le plus souvent sur des personnes démunies, pauvres, et même sur des enfants ? En constatant que, de plus, ces gens-là se bardent d’un attirail répressif outrancier et agissent dans la violence la plus effrénée, on ne saurait oublier la vilénie de l’idéologie punitive, discriminante, et parfois xénophobe qui est distillée dans ces arrière-cours. Ne faut-il pas s’avérer bien paranoïaque pour consacrer sa vie à surveiller les autres et bien vicieux pour vouloir punir ? Rien que l’ignoble et systématique « garde à vue » exerce, à elle seule, un démenti cinglant à la déclaration des droits de l’homme. Comment s’étonner que ces adeptes des « marches au pas » soient la cible des rebellions immédiates puisqu’ils s’adonnent à édifier le mur de protection du système. Et que dire de ces flics silencieux qui fichent et contrôlent les habitants d’ici comme des ennemis intérieurs. A quand le courage minimum d’en finir avec ces polices secrètes et d’état ?

Il y a plus méprisable cependant. Il y a ceux-là même qui font profession d’exercer le pouvoir. Cette oligarchie qui fait son métier d’être des élus. Ces élus professionnels ne sont en rien respectables. Ils ne sont en rien le peuple, ni même les représentants qu’ils se déclarent être. La démocratie, là, n’existe que le bref instant où le citoyen croit encore détenir son bulletin de vote, ce bout de papier dérisoire qui hésite un choix entre charybde ou scylla. De démocratie, elle n’a que la fonction élective provisoirement accordée, sinon, elle n’est qu’une oligarchie au service des exploiteurs, et aujourd’hui, une quasi-monarchie grotesque. Une monarchie sans royauté héréditaire (c’est sa seule limite à un absolutisme des oukases), mais une mono-archie emplie de ces roitelets impudents qui décrètent plus de répression, jugent qui peut passer les frontières ou décident à notre place de la vie future.

Il faudra un jour qu’ils rendent des comptes, ces professionnels de l’élection, ces prétendus chefs de quelque chose comme s’il suffisait de se targuer d’un pouvoir qui n’est pas à eux. Il faudra qu’ils expliquent la prétention de leurs actes et l’infamie de leurs décrets. Qu’il prenne garde que le peuple ne leur demande de quel droit ils ont ainsi disposé de nos vies. Oui, ils vivent de nos abdications, mais ils exploitent surtout nos épuisements. Les voilà qui fomentent des expulsions, des frontières, des contrôles. De temps à autres, bien sûr, le système crapuleux que certains ont mis en place devient visible lors d’un procès ou d’une « affaire », mais ces déboires masquent mal que l’oligarchie se nourrit des autres…Et quand bien même, ces élus professionnels construiraient une aimable politique, leur seule prétention de détenir nos vies, de décider à notre place reste une immondice. La seule démocratie est directe, et ne connait que des délégués révocables à tout moment.

Et puis, il y a ces accapareurs. Ceux-là qui prennent sur les autres, ceux-là qui font faire leur sale besogne, parce qu’ils prétendent s’approprier pour eux seuls un morceau de la planète terre. Ni le monde ni l’humanité ne sont à vendre. J’ai lu, bizarrement dans le Monde Libertaire, les errements « politiques » de certains appelant à associer les mots capitalisme et libertaire. Ceux-là se gardent bien d’user du mot d’anarchiste. Il leur faut une idée simple et le terme libertaire a toutes les connotations plaisantes à leurs yeux. En utilisant la crainte que les communistes révolutionnaires eux-mêmes ont de l’individu, en citant Proudhon, Bakounine, on peut réduire l’anarchie à l’absence de pouvoir, mais surement pas au désordre. Au désordre de quel ordre, d’ailleurs. L’anarchie est l’absence de pouvoir et c’est cette idée simple non-autoritaire, mais extraordinaire qui vaut contre tous les oppressions.

Il y a au moins un malentendu, sinon une imposture. Le capitalisme n’existe pas en soi, seule existe l’exploitation capitaliste. Pas de bourgeois sans exploités. Le jour où un type s’est enrichi en se déclarant propriétaire, il l’a fait sur le dos des autres. Le monde marchand vendrait sa propre mère et demande à chacun de s’y consacrer. Rien de plus ignoble que le processus d’héritage qui décide de l’inégalité des êtres humains. Le capitalisme est à vomir parce qu’il n’est qu’une exploitation à l’échelle planétaire. C’est ce que l’idéologie du « développement durable » prétend prolonger encore en dépit du désastre. Ces gens-là font de l’argent le fondement des relations, et de l’exploitation la seule qualité de la richesse. Ils prononcent les mots emploi, recherche et développement et ces termes ont dans leur bouche toute l’amertume des années d’oppression. L’humanité au contraire se pratique gratuitement. Même une recherche scientifique ne se brevète pas, elle se publie librement.

Chacune de nos résistances constitue une incroyable performance. Chacune de nos rebellions génère un immense espoir. Du moins, il y a ceux qui refusent de devenir ces auxiliaires de police qu’on nous demande de plus en plus d’incarner, à l’école, au lycée, à l’université, au supermarché, dans la rue même. Il y a ceux qui se battent, sabotent l’organisation policière du monde, offrent des refuges aux exclus de la vie de quelques horizons qu’ils soient. Ce monde ne tournera pas rond si facilement. Il existe une colère qui réintroduit la liberté dans les révoltes, une perspective libertaire contre le capitalisme, une alternative anarchiste contre le monde marchand…

Décidemment, oui, je me sens anarchiste, aujourd’hui et maintenant.

Thierry Lodé
Professeur d’Écologie Évolutive

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